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I, Daniel Blake de Ken Loach
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I, Daniel Blake de Ken Loach
I, Daniel Blake de Ken Loach

I, Daniel Blake de Ken Loach

À l’occasion du 77ème festival de Cannes, le groupe France
Télévision a diffusé et mis à disposition sur sa plateforme en ligne un catalogue
important de films ultérieurement primés ou en rapport avec les membres du jury de
cette édition du festival. C’est ainsi que j’ai découvert I, Daniel Blake, Palme d’or 2016
réalisée par le Britannique Ken Loach.


C’est l’histoire de Daniel, un Anglais soixantenaire issu de la classe ouvrière atteint
d’une maladie cardiaque qui l’empêche d’exercer correctement son activité de menuiser.
Pour recevoir sa pension d’invalidité, Daniel doit se confronter au système social anglais
et à toutes les complications administratives qui l’accompagnent. Il croise alors le
chemin de Kati, mère célibataire trentenaire luttant elle aussi pour recevoir ses pensions
et trouver du travail. Elle et Daniel vont alors s’épauler du mieux qu’ils le peuvent dans
ce combat qui, au-delà d’un besoin de revenus, relève d’un besoin de dignité et de
reconnaissance.


Ken Loach n’en était pas à son coup d’essai avec ce genre de films lorsqu’il a réalisé I,
Daniel Blake. La vie et les difficultés rencontrées par la classe ouvrière anglaise font
l’objet de nombre de ses films comme dans My name is Joe en 1998 ou Sorry, we missed
you
plus récemment en 2019. Il déclarait d’ailleurs en 2016 lors d’une interview : « Moi,
Ken Loach, je reste fidèle à la classe ouvrière, politiquement et artistiquement. ».

« Je ne suis pas un numéro d’assurance, ni un beug sur un écran. […] Je m’appelle
Daniel Blake. Je suis un humain, pas un chien et en tant que tel je clame mes droits. Je
vous demande de me traiter avec respect. Moi, Daniel Blake, je suis un citoyen. Rien
de plus, rien de moins. »


Pendant 1h40, Ken Loach peint le portait d’un homme qui a travaillé toute sa vie dans
des chantiers et qui se trouve forcé de vendre ses meubles pour survivre. Il peint le
portrait d’une femme mère de deux enfants qui s‘effondre au milieu d’une banque
alimentaire car elle n’a pas mangé de repas consistants depuis des jours, sacrifiant sa
part de nourriture pour alimenter ses enfants. En somme, il peint le portrait d’humains
confrontés à la froideur et à l’irrespect des services sociaux anglais qui considèrent les
individus comme des dossiers à traiter. Il met en scène avec une grande justesse et une
sensibilité accrue le quotidien de milliers de personnes noyées dans des systèmes
informatiques impersonnels et déshumanisants.


Bien que ce film prenne place en Angleterre, le système Français n’est pas si loin de
celui mis en avant par Ken Loach. Selon l’INSEE, 2 millions de personnes se trouvaient
en situation d’extrême pauvreté en France en 2018. Les inégalités déjà existantes se sont
accentuées pendant la crise du COVID en 2020 lorsque les populations les plus
vulnérables (travailleurs précaires, personnes âgées…) se rendaient au travail à
l’extérieur, s’exposant ainsi plus au virus, ou vivaient dans des milieux denses, voire
surpeuplés où la distanciation sociale n’était pas possible. Les mesures gouvernementales de relance économique ont plus profité aux entreprises et aux
individus riches, creusant encore les inégalités.


Le réalisateur touche aussi au sujet de la dématérialisation dans les milieux
administratifs qui mettent en grande difficulté les personnes âgées ou n’ayant pas accès
à du matériel informatique. En France, il est de plus en plus courant de devoir prendre
rendez-vous en ligne pour rencontrer un professionnel de la santé ou simplement pour
des renseignements administratifs. Ce processus, au-delà de livrer à elle-même une
grande part de la société, est extrêmement infantilisant pour des individus que l’on traite
comme des ignorants tout comme dans I, Daniel Blake.


Avec ce film, Ken Loach reste fidèle à ses convictions et prend grand soin de dénoncer
les inégalités qui pullulent dans le système anglais, miroir des autres systèmes sociaux
européens. Dans un contexte de violence envers les minorités et les classes populaires,
ce film retentit plus que jamais face aux résultats des élections Européennes qui
promettent un avenir incertain aux marginaux partout dans l’Union.

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